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Deux comptes de la chartreuse du Mont Sainte-Marie, datés du début du XVIé siècle, évoquent, non pas l’église, mais la fontaine Saint-Léger de Gosnay, dont on a totalement perdu la trace aujourd’hui.

Le document le plus ancien qui évoque l’église paroissiale de Gosnay est le « Centième d’avril 1570 ». Il y est simplement précisé que le village était constitué d’une église « l’hôtel dieu est amasé sur demi-mesure » avec son cimetière « l’attre et le cimetière d'une mesure appartenant à la chapelle », une chartreuse de femmes, une chartreuse d’hommes, un moulin à eau et 14 manoirs amasés sur environ 31 mesures. Un riez sert aux « pâturages des bestiaux de tous les manans et habitans ». Sire Rémy Duriez, prêtre chapelain de la paroisse de Gosnay, était prestataire de la cure d’Hesdigneul où il résidait. Il y tenait en louage de Sire Adrien Le Riche, prêtre, une maison et un jardin d’un quartier de contenance.

Eglise

Eglise de Gosnay vers 1600

La tour de l’église, érigée en 1519 avec des matériaux récupérés lors du démantèlement du château de Thierry d’Hireçon par les Pères chartreux du Val Saint-Esprit, est aujourd’hui, la partie la plus ancienne de l’édifice. On devine encore sur un gré barlong sculpté, au pied ouest de la tour, l’inscription « l’an 1519 » en lettres gothiques.

Un tableau de la collection De Croy, réalisé avant 1610, donne à l’église un positionnement surprenant de la nef par rapport à la tour de 1519.

Les guerres de 1710 et le siège de Béthune en particulier, causèrent de graves dégradations aux édifices religieux de la Région et bon nombre d’églises paroissiales furent reconstruites. Celle de Gosnay n’a pas échappé à ce mouvement. Elle profita de l’initiative du diocèse pour adapter les dimensions de l’édifice aux besoins des paroissiens. Le registre paroissial témoigne au 15 mai 1745, de la décision de l’Evêque d’Arras ordonnant « la démolition de la nef et du chœur pour sa reconstruction ». Les travaux durèrent 16 mois, et la bénédiction de la nouvelle église et du cimetière attenant sont datés du 30 septembre 1746. La nouvelle église, agrandie et réorientée à l’est, a connu depuis de nombreuses péripéties et sa démolition fut plusieurs fois envisagée.

Fermée et interdite au culte en 1791 avec 38 autres églises du District de Béthune, elle fut vendue 3700 livres aux enchères publiques le 29 frimaire de l’an II et le procès verbal de l’événement précise que la vente se tint « en l’absence des officiers communaux dûment convoqués ». Son acquéreur, Jean Baptiste Wastelier, fut longtemps considéré comme le bienfaiteur de l’église, pour avoir su la préserver. Il avait en fait sollicité et obtenu le 24 ventôse de l’an III, l’autorisation de la démonter pour en vendre les matériaux mais ce projet ne fut, heureusement, jamais réalisé...

Longtemps utilisé comme grange, le bâtiment fut racheté par la commune vers 1815 pour qu’il retrouve sa vocation cultuelle. Cette longue période sans entretien faillit lui être fatale. Des travaux d’entretien ou de restauration, parfois conséquents, furent réalisés plusieurs fois.

Eglise

Eglise Saint Léger

En 1870, l’église était menacée de ruines et les conclusions du rapport de l’expert de l’époque étaient alarmantes, « le chœur menace de s’écrouler, la nef est aussi en mauvais état, il faut abandonner le projet de réparation et de restauration, ces deux parties d’église doivent être entièrement démolies et reconstruites sur de nouvelles fondations ». L’avis de l’expert ne fut pas suivi et l’église fut consolidée et restaurée grâce à l’influence du maire, Georges Gamot. Le soutien financier de la famille Wastelier, en fit, cette fois, de réels bienfaiteurs.

Le 9 juillet 1950, l’effondrement de la voûte de la nef ne fit heureusement pas de victime. L’incident, imputé aux bombardements aériens sur la commune à la fin de la deuxième guerre mondiale, nécessita de très importants travaux de charpente, plâtrerie et vitraux, dont le financement fut assuré par les crédits « dommages de guerre ».

En 1990, Philippe Decroix, dont les multiples travaux sur le patrimoine régional font toujours autorité, écrivait à propos de l’architecture de l’église, « Cette petite église de village occupe un rang dans la longue liste des églises du Pas de Calais. Elle a une unité architecturale qui est en soi une qualité de l’art. L’appareillage de la craie à la tour est parfait, celui de la brique et de la pierre à la nef et au chœur constitue un décor sobre mais apparenté à celui des châteaux artésiens et picards de la même époque. Tel qu’il est, l’édifice présente un intérêt patrimonial évident pour les Gosnaisiens de souche, mais aussi pour l’Artois, tant pour son architecture simple et modeste que pour ce qu’il contient. »

Eglise

Eglise Saint Léger

En 1998, Dom Devaux, moine chartreux contemporain de Sélignac (Ain), dans un travail remarquable sur « L’architecture dans l’Ordre des chartreux » précisait qu’il « était fréquent que les chartreux fassent adopter le plan de leur église conventuelle pour les églises extérieures, à titre de paroisse… ».

    Les églises cartusiennes se caractérisaient par les éléments architecturaux suivants:
  • un bâtiment à une seule nef rectangulaire, sans bas côtés, ni transept, ni chapelles latérales, dont la largeur, généralement de moitié égale à celle de la longueur, avoisine les 9 mètres.
  • une abside, voûtée, à peu prés de la largeur de la nef.
  • une voûte dont la portée atteint rarement plus de 10 m.
  • des murs généralement fort épais, pouvant aller jusqu’à 2 m dont les assises inférieures étaient irrégulières.

A l’intérieur, la muraille était blanchie par un crépi à faux joints marqués de rouge. L'église paroissiale présente encore toutes ces caractéristiques aujourd'hui.

Les églises des deux couvents ont été minutieusement démontées lors de la Révolution française et aucun document n’en a conservé le moindre souvenir. Nous sommes donc autorisés à croire que l’église paroissiale de Gosnay est de ce fait, le seul témoignage de ce que pouvaient être les églises du Val Saint-Esprit et du Mont Sainte-Marie avant la Révolution.

L’église Saint-Léger a hérité dés sa restitution au culte, d’un nombre assez conséquent de vestiges immobiliers des deux chartreuses de Gosnay, qui en firent longtemps son originalité et sa richesse. Depuis quelques années, la quasi totalité de ces objets, classés monuments historiques, ont du être confiés, pour leur sécurité, au Trésor de la Cathédrale ou au Musée d’Arras après leur restauration.

Eglise

Choeur de l'Eglise Saint Léger

Aujourd’hui, la petite église de Gosnay fait l’objet de beaucoup d’attentions et d’études techniques, depuis que René Ducourant, artiste peintre, s’est engagé à y créer une « unité d’art sacré contemporain » avec des œuvres créées spécialement à cet effet. La 1ère tranche a été inaugurée le 15 décembre 2000 dans le chœur de l’église et chacun attend maintenant que les collectivités publiques s’engagent dans un programme de restauration globale de l’église et de son environnement. Ce projet, n’aura pas d’équivalent au Nord de Paris. Il contribuera à valoriser un peu plus le patrimoine communal et donnera une nouvelle image de l’arrondissement, du département du Pas de Calais et de toute la Région, carrefour touristique important, où les intérêts culturels et économiques se rejoignent.